Formation inter-degrés autour du Plurilinguisme Intégrer des élèves allophones ?


Cette formation a eu lieu le vendredi 14 avril au collège Cachin, à Cherbourg en Cotentin. Elle a été animée par Anne Fenard-Bosch CPC, Aurélie Cordier et Christelle Bertoux, toutes deux enseignantes d’anglais. Elle a rassemblé des enseignants du premier degré de la maternelle au CM2 ainsi que du second degré en anglais, espagnol et lettres.

M. Courteille, IEN, et Mme La principale étaient présents et ont ouvert le stage pour rappeler l’importance des liaisons en cycle 3 afin de continuer à dynamiser l’apprentissage des LVE et développer une culture commune autour des gestes professionnels.
Voici un compte-rendu de la formation, rédigé à partir des notes prises, que vous trouverez en pièce jointe. N’hésitez pas à vous reporter à ces notes pour plus de précisions.

Favoriser l’inclusion des élèves allophones

Un premier retour a été fait sur le plurilinguisme présent dans les établissements représentés et sur quelques définitions pour jeter les bases de la discussion :

  • EBEP : élèves à besoins éducatifs particuliers
  • JAMO : jeunes avec moins d’opportunité (jeunes qui rencontrent des obstacles sociaux, économiques, des problèmes de santé, des difficultés d’adaptation linguistique ou culturelle…)

Plusieurs démarches pour favoriser l’inclusion des élèves allophones sont envisageables qui s’appuient en premier lieu, sur l’évaluation de la maîtrise par l’élève de sa langue maternelle, et en particulier à l’écrit. Certains élèves sont entrés dans le code de l’écrit sans être allés à l’école et l’ont parfois appris avec leur famille. Les mineurs isolés ont souvent une bonne maîtrise à l’oral.

Pour faciliter la communication, il est possible de recourir à l’anglais, à plus forte raison lorsque la langue maternelle partage le même alphabet. Néanmoins, en UPE2A, il est important de parler en français avec tous lorsque le groupe est réuni.

Pour rappel, la procédure lors de l’arrivée d’un élève allophone en UPE2A prévoit :

  • un signalement à l’inspection ;
  • des tests pour les apprentissages en cycle 1 ou 2, selon l’âge ;
  • un test pour apprécier la maitrise du français et de l’anglais.

Un élève allophone a besoin d’un temps d’adaptation. Il peut rester mutique 2 à 3 semaines mais cela ne signifie pas un refus de sa part. Il s’agit d’attendre le bon moment.

Des fiches conçues pour les enseignants de Français Langue 2 par le CNRS sont disponibles à cette adresse : https://lgidf.cnrs.fr/fiches-langues
Elles « [présentent] la langue, ses caractéristiques externes, et quelques propriétés phonologiques et grammaticales saillantes, dans une optique contrastive Langue > Français » et peuvent aider les enseignants dans l’accompagnement des élèves.

Le curseur en termes d’exigences concernant l’écrit est différent selon les pays et la question reste complexe en France. Il est intéressant de rappeler que l’écriture cursive est une spécificité de l’école française et l’utilisation du script peut être un élément facilitateur pour éviter les fautes de copies ou des confusions.
De plus un décalage culturel peut se manifester dans la maitrise des savoirs-faire comme dans le cas d’un élève australien qui ne pouvait plus utiliser de crayon à papier pour les tests en France, dont l’orthographe pouvait être évaluée et qui travaillait sur une tablette ou un ordinateur. Ces savoirs-faire pourront donc être évalués pour réfléchir aux adaptations à envisager.

Concernant l’usage du dictionnaire, il peut être autorisé pendant les examens, et on peut avoir recours à un dictionnaire numérique (sur tablette) pour les langues rares. Toujours pour le lexique, les imagiers sont également un outil précieux.

La complexité que représente le passage constant d’une langue à l’autre (parfois entre 3 langues avec l’anglais comme langue intermédiaire entre la langue maternelle et le français) mérite d’être soulignée ainsi que les efforts que cela demande aux élèves allophones qui deviennent généralement de bons linguistes.

Différencier les évaluations

D’une manière générale, il faut valoriser ce que font les élèves allophones et être vigilant à la maîtrise de leur langue maternelle pour les aider et leur permettre de se projeter dans la maîtrise d’autres langues.

Un point important est donc de montrer aux élèves qu’ils progressent. On peut par exemple s’appuyer sur des défis autour de la progression dans les paliers de maitrise d’une LVE, chacun représenté par des étoiles (de A1 à B2, de 1 à 4 étoiles).

Par ailleurs, il est judicieux de mener un travail en amont avec les enseignants pour élaborer des fiches de lexique afin de faciliter la compréhension du déroulement de la classe. Les élèves développent aussi des méthodes propres et une entraide sur laquelle on peut s’appuyer.

Pour les évaluations en UPE2A, plusieurs pistes sont envisageables pour les adapter et les différencier comme donner les mots clefs et les associer à des images que ce soit pour la compréhension d’un texte ou pour des activités en sciences.

On pourra également simplifier les consignes, voire les traduire (outils numériques de traduction), ce qui a permis de montrer dans certains cas que des élèves avaient compris beaucoup de choses d’un texte.
Note : une attention particulière est à porter à la LV2 puisqu’elle est nécessaire pour le baccalauréat et que cela doit donc être pris en compte pour la stratégie d’orientation de l’élève.

L’évaluation pourra enfin reposer sur une différenciation entre niveaux débutant / avancé dans le cadre d’un même projet avec des attentes adaptées au niveau de chacun. De manière à différencier, des aides pourront être envisagées comme :

  • garder le cahier ;
  • une trace écrite à trous à recopier ;
  • encourager les notes de traduction en langue maternelle dans un document ;
  • reformuler les consignes en face à face ;
  • travailler en binômes en les adaptant en fonction des compétences pour développer l’entraide (un élève à l’aise à l’oral mais avec peu de maîtrise à l’écrit peut travailler avec un élève ayant des compétences à l’écrit).

Une grille peut aussi être proposée en tâche finale dans laquelle les élèves s’auto-évaluent en entourant des items.

L’écrit

Une activité, « A vous d’écrire ! », a permis aux stagiaires de mieux cerner la difficulté de changer d’alphabet ainsi que de l’importance de la maitrise de la langue maternelle dans ce processus ou de revenir sur les stratégies à l’œuvre (comme le repérage de paragraphes).

Parmi les outils ou démarches mobilisables pour développer la maîtrise de l’écrit, peuvent être mentionnés :

  •  manipuler un texte pour en écrire un nouveau (« Plan français ») ;
  •  le détournement de poésies ;
  •  le dictionnaire avec une entrée phonémique, qui permet de chercher un mot commençant par un son ;
  •  la correction de dictée avec une tablette (lexiclic) qui permet un travail de l’oral vers l’écrit et qui et intégrable dans Word ;
  •  apprentilangue (utilisation de l’image) ;

Pour le collège, la poésie (ou les jazz chants) constitue un support efficace à tous les niveaux pour travailler :

  •  la compréhension ;
  •  la prononciation / mise en voix ;
  •  la mémorisation par l’illustration, la gestuelle (en cycle 3 moins en cycle 4) ;
  •  la production écrite.

La poésie offre en effet un texte court, avec un réseau de répétitions de mots ou de sons (les vers) qui facilite la fluidité.
Une évaluation orale peut être envisagée avec des enregistrements en évaluant la mémorisation, la fluidité, la prononciation, le volume de la voix…
En 6e, un travail de ré-écriture « à la manière de » est une autre piste.

En littérature, la découverte d’albums en classe de FLS, comme « Les mystères de Harris Burdick », pourra mener à un travail sur l’identification de la situation (qui, quand, quoi), des personnages pour ensuite aboutir à des activités de production comme des interviews imaginaires ou l’écriture collaborative d’une histoire à mettre en voix.
Concernant les critères à retenir pour choisir un album, les participants au stage ont d’abord identifié :

  •  l’apport culturel,
  •  la nature authentique,
  •  l’intérêt de l’histoire pour les élèves,
  •  la présence d’une structure répétitive du texte / compétence langagière,
  •  les illustrations représentatives,
  •  le niveau langage adapté,
  •  la syntaxe,
  •  le lexique et la présence de mots transparents,
  •  la qualité de la mise en page / police / taille, abordables pour tous,
  •  la qualité du support.

Des documents du British Council sur les choix opérés ont permis de conforter certains de ces éléments comme le degré de didactisation, la structure narrative ou la qualité des illustrations, qui peut être un élément motivant.
Certains albums, traduits en espagnol, peuvent être proposés pour présenter la langue au moment du choix d’une LV2.

Les dispositifs EMILE

L’intérêt des dispositifs EMILE (Enseignement D’une Matière Intégrée en Langue Etrangère) est rappelé au travers d’exemples tirés d’écoles du secteur. Une enseignante qui a obtenu la certification complémentaire en LVE témoigne sur son parcours et le processus qui l’a menée à passer cette certification et mettre en place un enseignement bilingue intégrant une LVE en l’EPS. Dans le cadre de cet enseignement, l’anglais devient moyen de communication et permet à la fois l’apprentissage de la discipline et l’apprentissage de la langue cible. Cette démarche est applicable à d’autres contextes comme le calcul, des devinettes, la géographie (plus que l’histoire).

Pour l’évaluation, on pourra s’appuyer sur le document suivant pour positionner les élèves : https://www.france-education-international.fr/productions-orales-illustrant-les-6-niveaux-du-cecrl/francais?langue=fr qui propose des exemples de production à l’oral (en continu et en interaction) pour illustrer les niveaux de compétences.

Au collège, en anglais, la démarche EMILE peut aussi être illustrée par deux projets, l’un associant anglais avec les sciences (Wolf Island) et l’autre associant anglais avec l’histoire (à partir d’un classique à l’école primaire « Otto »).

Conclusion de la journée

La journée a été conclue par un échange entre participants autour de leurs pratiques et de projets au sein de leurs établissements : rituels à l’échelle de la classe ou de l’école mobilisant les LVE, mobilités, projets interdisciplinaires, labellisation… avec un point sur l’importance du travail avec un assistant pour mettre en place des activités orales et pratiques ou des activités en interaction ancrées dans la culture de son pays.

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