Une piste : gestion des grandes hétérogénéités


Un exemple d’activité réalisée pour « Regards des jeunes de 15 ans » dans le cadre du Prix Bayeux.

Cette contribution est proposée par Sophie Chevallier-Guiraud, professeure d’anglais au collège Chamelle Lacour et formatrice académique.

Quelle exploitation possible d’un tel évènement ?

Ce travail a été proposé à deux classes de 3ème sur une semaine (quatre séances de cours seulement pour ces élèves qui bénéficient d’une séance supplémentaire avec un autre professeur d’anglais en co-intervention).

En plus des intérêts multiples que présente la participation de nos élèves à cet évènement, l’objectif principal était de préserver au maximum la spontanéité des réactions des élèves dans la langue cible et la fraîcheur de leur « regard de jeunes » sur le monde, en réduisant le temps de préparation et de réalisation.

Compte tenu du profil atypique de l’une des classes, à savoir 2 élèves anglophones, 1 élève ULIS, et des disparités importantes dans la maîtrise de la langue comme dans la motivation, un objectif secondaire considérable était d’emmener tous les élèves dans ce projet avec comme défi de remporter leur adhésion en les plaçant en situation d’urgence pour qu’ils n’aient d’autre choix que de faire preuve d’une organisation efficace et de trouver les meilleures stratégies pour fournir un travail finalisé.

Enfin il s’agissait de mesurer l’impact du recours à l’outil numérique, en l’occurrence la tablette, dans la stimulation et l’engagement des élèves dans une tâche.

Compte tenu du peu de temps consacré à ce travail, il a été décidé de ne pas demander aux élèves d’expliquer en quoi la photo retenue était représentative de l’année écoulée mais de se concentrer sur les ressentis et l’interprétation de l’image choisie.

Comment obtenir la cohésion et l’adhésion en tenant compte des contraintes liées aux hétérogénéités ?

Après une brève présentation du projet et des enjeux en classe en anglais, les élèves ont découvert les photos exposées dans un lieu dédié dans l’établissement (ou en classe, en groupe en consultant les photos préalablement imprimées/plastifiées, exposées sur deux salles de classe), avec pour unique consigne de quitter l’exposition ou la séance en ayant sélectionné au maximum 3 photos. L’intention était de mettre à profit ce temps « hors classe » pour laisser les élèves échanger dans la langue qu’ils souhaitaient, sans contrainte, moment particulièrement profitable pour une élève lourdement handicapée déficience visuelle qui a pu se faire décrire et expliquer quelques photos, mais aussi aux élèves anglophones et germanophones présents dans l’une des classes qui se sont instinctivement engagés comme personnes ressources dans les différents groupes, ou individuellement auprès des élèves.

Quid de l’interlangue ?

Rappel : la consigne était réduite au minimum (« Sélectionner au maximum 3 images »).

Pour l’une des classes, ce moment a généré des échanges libres, parfois peu académiques dans la forme, car en plusieurs langues, menés par un élève germanophone bilingue (anglais-allemand-français débutant) et une autre élève Albanaise quadrilingue (Albanais-Allemand-Anglais-Français). Rien n’était figé, les groupes étaient informels et mouvants.

De retour en classe pour le bilan, de courtes réactions des élèves ont été filmées à l’issue de la visite de l’exposition et de la découverte des photos.

(Retrouvez d’autres réactions d’élèves en cliquant sur ce lien)

Les échanges lors de la visite de l’exposition n’ont pas été filmés ou enregistrés, car les professeurs ont pensé que cela figerait les discussions et que l’on en perdrait la spontanéité recherchée.

Comment s’organiser pour être le plus efficace possible ?

Les élèves ont pu décider de travailler sur leur photo en équipe, en binôme ou seul, et choisir la solution qui leur semblait la plus efficace.

Tous se sont spontanément répartis en groupe ou en binôme, y compris l’élève germanophone qui s’est intégré dans un groupe de travail, même s’il a finalement produit un enregistrement seul. Il est également intervenu spontanément en soutien dans d’autres groupes.

Bien que les tablettes étaient à disposition des élèves à chaque séance principalement pour consulter les photos, vérifier le vocabulaire ou prendre des notes, une forte demande s’est vite manifestée de créer un support écrit, ce que tous les élèves ont fait, à l’exception d’un binôme ; ces deux élèves disposant d’une bonne aisance à l’oral (une jeune fille francophone et l’autre jeune fille anglophone), ont choisi de passer directement à l’enregistrement.

(Retrouvez d’autres productions d’élèves en cliquant sur ce lien)

Objectifs atteints ?

Tous les groupes ont réussi à réaliser un montage audio/photo, même si tous n’ont pas eu le temps de le transférer via airdrop. Le temps imparti a donc été insuffisant pour permettre aux élèves les moins à l’aise de finaliser le projet.
Par ailleurs, de nombreux élèves ont spontanément pris l’initiative d’utiliser leur tablette pour rechercher sur internet le contexte dans lequel la photo choisie avait été prise.

Concernant la gestion des hétérogénéités et du handicap, il est forcément regrettable que l’élève déficience visuelle ait été limitée aux choix de ses camarades. En telle situation il pourrait être profitable de réserver davantage de temps pour la consultation des photos, et peut-être proposer une description plus détaillée enregistrée, à écouter via l’ENT en amont. Cependant les temps d’échange proposés avec ses camarades lui ont malgré tout permis de faire son choix (à savoir la photo représentant Théo Curin, nageur quadri-amputé, aux Jeux Paralympiques).

En revanche en ce qui concerne les élèves anglophones et les élèves en difficulté, les échanges inter- et multi-langues ont constitué un moment fort qui a permis de « dédramatiser » le tout anglais en ne laissant pas les autres langues étudiées ou maîtrisées par les élèves, à la porte des échanges spontanés.

Le projet a également montré à quel point les élèves se sont mobilisés sur ces images et par conséquent sur le monde qui les entoure. L’adhésion a très clairement été obtenue autour du Prix Bayeux malgré les lourdes contraintes imposées par l’exploitation proposée en classe.

Enfin certains élèves ont cependant exprimé leur déception de ne pas avoir eu la possibilité de s’entraîner davantage pour produire un oral de meilleure qualité. En effet, certains élèves ont produit un écrit oralisé alors qu’il était attendu une production orale ; un temps d’entraînement sur tablette plus long aurait permis d’affiner la qualité des productions, mais cela n’était pas l’objectif fixé.

(Retrouvez d’autres productions d’élèves en cliquant sur ce lien)

Concernant l’utilisation du numérique, il a permis à certains élèves disposant d’une moins bonne maîtrise de la langue, de s’attribuer un rôle efficace dans la réalisation du montage image/son, y compris en intervenant auprès d’autres groupes et de développer leurs compétences numériques (« Développer des documents multimédia » ainsi que « Partager et publier » si on se réfère au Cadre de Référence des Compétences Numériques).

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